Je vais vous conter aujourd’hui une de mes joyeuses névroses… Bienvenue dans le monde merveilleux de la Misophonie.
Les symptômes d’un enfer quotidien.
Depuis toujours, mais je dirais que ça s’est accentué à l’adolescence, j’ai une sensibilité particulière aux sons. Certains d’entre eux me rendent malade pratiquement au sens littéral. Mon rythme cardiaque s’accélère, je ressens une énorme pression au niveau du plexus, sensation de fracture du tympan (je sais, c’est impossible), mais surtout une violente colère monte en moi assortie d’un dégoût. Mes mâchoires se serrent à m’en faire péter les molaires pour calmer ma souffrance, je claque des dents pour couvrir le bruit, je me bouche les oreilles aussi fort que possible. Mais je ne peux rien contrôler.
Instinct de destruction : Activé
Des envies primitives apparaissent : j’ai envie de frapper la personne responsable de ce bruit – pour ne citer que ça. C’est plus fort que moi. C’est insupportable. Ca me fait mal dedans moi. J’ai le sentiment quand ça arrive qu’on cherche à me torturer, à tester ma tolérance. Et surtout, je me sens seule et déconsidérée : je ne comprends pas pourquoi je suis la seule que ça énerve autant.
Camaïeu non exhaustif de mes sons insupportables
J’ai longtemps cru que c’était dû à mon hypersensibilité, mon sens de l’observation qui voit et ressent tout. Pour que vous vous rendiez compte de ce qui me fait mal, voici quelques exemples :
Les aspirations faites par des gens buvant des liquides chauds (comme le thé mais surtout la soupe) ; les Mastications sonores, bouches fermées comme ouvertes ; les ronflements ; ceux qui scient leur assiette en même temps que leur viande ; les Ruminants qui ne savent pas mâcher leur chewing gum sans garder leur langue cachée dans leur cavité buccale (la salive produite avec les langues à vue, fait des bulles d’air qui elles-même font du bruit) ; les reniflements intempestifs ; la prononciation sifflante des “s” ; les tentatives désespérées de ceux qui passent leur langue sur leurs dents pour dénicher des bouts de nourriture coincée (encore une fois, ça fait un bruit d’aspiration affreux et comme on n’y arrive jamais du premier coup, la récurrence de cette action me fait exploser le cerveau) ; ceux qui se coupent les ongles dans les lieux publics ou la même pièce que moi (le bruit des ciseaux, mais surtout celui du coupe-ongles est un supplice) ; Ceux qui ne font pas l’effort de décoller les pieds du sol quand ils marchent ou de lever leur chaise quand ils se mettent debout…et j’en passe.
La Misophonie : Un Trouble sous-estimé
Les gens qui ne comprennent pas, ceux qui n’ont pas la mesure de votre douleur, en découvrant votre talon d’Achille vont s’amuser à vous titiller, à vous faire perdre les pédales en reproduisant encore et encore, le truc qui vous exaspère. Ceux qui comprennent ou qui acceptent comme les membres de ma Troupe de Théâtre (que je remercie), vont hurler pour couvrir le bruit de la chaise qui racle au sol et qui vous désintègre l’intérieur de votre cervelle afin de détourner votre attention : une sacrée preuve d’amour et de non-jugement.
Le Bal de l’incohérence est ouvert.
Le plus étonnant, c’est que je déteste entendre chez d’autres des bruits que je produis moi-même. Exemple : craquer mes doigts, ou quand mes articulations craquent (vertèbres, hanches, chevilles, genoux). Si je le fais, rien à signaler. Le bruit est intérieur et ne me heurte absolument pas. Quand ça vient de l’extérieur, c’est d’une violence inouïe, comme si j’étais giflée 8 fois de suite.
Mon problème a un nom : miso.phonie
J’ai découvert, par « hasard » sur youtube, une interview de Bruno Salomone, pour l’émission « Clique » de Mouloud Achour, que j’affectionne particulièrement. Il sortait un livre. Ah étonnant ! Bruno Salomone, humoriste, acteur habitué des One Man Show, drôle à souhait, a écrit un livre dont le titre est « Les Misophones ». Tiens, tiens, c’est quoi ça ? Miso : haine ; Phonie : les sons. La Misophonie c’est la haine de certains sons. J’apprends dans l’interview que Bruno Salomone en est atteint et qu’il décrit exactement les symptômes dont je viens de vous parler plus haut, donnant l’impression extérieure que vous présentez des comportements autistiques.
J’apprends que mon trouble a un nom et que pleins d’autres personnes en souffrent (environ 15% des français). Dingue ! Pire : l’acteur nous apprend ceci : des études scientifiques ont prouvé que la misophonie était due à un dysfonctionnement neuropsychique (rien qu’ça!). Le jour-même, j’achetai le livre. Et je pense que 4 heures de lecture ont suffi pour que je le dévore.
Les Misophones de Bruno Salomone
C’est un roman qui décrit parfaitement les sentiments d’angoisse, d’agacement, de solitude et de torture que l’on éprouve quotidiennement. L’écriture est assez drôle je dois dire. Ça se lit très bien et la fin est vraiment poétique, jolie. Un roman de plage, parfait dans votre sac avec votre serviette et votre crème solaire biodégradable.
Le Dilemme : Dire ou ne pas dire ?
Comment dire à votre ami, votre parent, votre collègue que vous exécrez certaines de ses manières ? Que ses attitudes, sa gymnastique labiale vous dérange, que lorsqu’il commence, vous n’entendez plus rien d’autre que ça ? Que même sa respiration est un calvaire ? C’est comme si tous les sons alentours, les sons de la nature, les Klaxons de la ville, diminuaient brusquement en décibels et que l’intensité de ce son insoutenable augmentait de seconde en seconde.
La Misophonie n’est pas à confondre avec l’hyperacousie qui elle, peut être perçue comme un superpouvoir. Les rares atteints de ce syndrôme, entendent tout plus fort, leurs capacités auditives sont exceptionnelles (ils vivent une souffrance indescriptible d’ailleurs eux aussi). Un petit pois qui tombe au sol ou la voisine du 6ème étage qui passe la serpillère, ils entendent tout. Ceux atteints de misophonie n’entendent pas mieux ou plus que les ordinaires mais certains des bruits créent une réaction de rejet, de gêne, n’ayant aucun rapport avec le volume sonore.
En Conclusion…
Vous avez découvert un super bouquin à lire, dans cet article, pour occuper vos heures de farniente, mais surtout, la leçon à tirer est la suivante : prenez au sérieux un proche qui ose vous confier son inconfort, sa honte face à certains bruits de la vie de tous les jours et SURTOUT ne le prenez pas personnellement s’il dit avoir un problème avec un bruit dont vous êtes l’auteur. Soyez juste vigilants, pour l’épargner tant que possible. N’ayez pas ce réflexe de le voir comme une « chochotte », un « fragile », un « emmerdeur ». Rappelez que le premier à en souffrir n’est pas vous, mais bien lui.
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j’ai découvert récemment ce mal… c’est étrange !
Oui, c’est vrai que c’est étrange, je te l’accorde ! ^^
Je comprend tellement.. Je me sens moins seule en lisant cette article ! Mon copain est tombé sur un article sur ça il y a pas longtemps c est la que j’ai pris connaissance de ce mal en me disant ha c est ça que j’ai… Pas facile à vivre tous les jours !
Merci d’avoir partagé ça, j’ai eu énormément de réactions de gens me disant se sentir moins seuls en regardant cet article, sur ma page Facebook ou Instagram. Je ne pensais pas que tant de gens se sentiraient concernés.
Je ne connaissais pas, en tout cas son nom Merci Ornella de m’ouvrir a cela Prends soin de toi Bises
Merci Emeline, je te fais des gros bisous, prends soin de toi aussi. J’espère que ta grossesse se déroule bien! ^^
Je découvre et c’est important d’en parler.
Car nous sommes souvent hâtifs à juger. Une meilleure connaissance de ces symptômes permet d’aborder l’autre avec davantage de bienveillance.
Merci Ornella
Absolument ! Merci pour ton regard toujours si bienveillant !
Je ne connaissais pas du tout, c’est étrange. En tout cas bon courage.
Je ne connaissais pas du tout, c’est un article intéressant ! Je connaissais la sensibilité aux sons et aux bruits, mais je ne pensais pas que ça pouvait aller jusqu’à la haine et un réel enfer à vivre.
Le mot haine se réfère à l’étymologie du mot “miso” mais c’est plus un dégoût qu’une haine à mon sens.
Merci pour cet article intéressant et pour le partage de la lecture ! 15 % de la population c’est beaucoup de gens qui en souffrent…
Oh mon dieu, j’en ai les poils qui se dressent ! Je suis HYPER énervée par les bruits de bouche ou les bruits de déglutition, mais je ne peux imaginer ce que tu ressens, c’est carrément le niveau au-dessus et ça doit être épuisant !
Oui, c’est épuisant, tu as raison. On fait de son mieux pour minimiser les effets mais c’est pas évident.
Ca fait quelques années que je sais que j’en souffre. Je pourrais tuer mon compagnon quand je l’entends manger !
J’essaye de me raisonner parce que ce trouble peut finir en phobie sociale et pas envie de faire une thérapie TCC pour ça !
Line de https://la-parenthese-psy.com/
Absolument tous ces bruits et façons d’être m’énervent au plus haut point et me crispent intérieurement très fort mais ça en reste là et je prends déjà sur moi… Vous c’est carrément fois 1000, je ne savais pas et je comprends totalement ! Il est bon aussi de diffuser ce genre de symptôme bizarre car non commun puisque c’est au travers d’habitudes complètement banales et ce, dans les transports, au travail, chez soi… Merci à vous !
C’est gentil de donner votre soutien !